Alors que l’hexagone souffre d’une importante désindustrialisation[1], alors qu’il voit son taux de « grande pauvreté » s’accroitre[2] tandis que celui-ci régresse dans le reste du monde, alors que le pays n’arrive toujours pas à résorber son chômage de masse[3], alors que la précarité s’installe et déclenche un puissant mouvement de révolte dans la rue, benoîtement, François Hollande s’inquiète de la montée de l’extrême droite (Le Parisien, 31/03/19).
Après avoir méchamment plombé l’économie française, que l’ancien président ne s’alarme pas de la poursuite du déclin opéré par son clone de ministre de l’économie[4] miraculeusement élu en 2017 a certes de quoi révolter. Mais ne nous y trompons pas : cette inquiétude vis-à-vis de l’extrême droite est non seulement parfaitement ciblée, mais elle constitue l’un des principaux marqueurs identitaires de la gauche française depuis François Mitterrand, l’homme qui, tel un apprenti sorcier, a initié le mouvement de déclin social[5] dans lequel nous nous trouvons encore, et mécaniquement propulsé le FN de l’époque vers les sommets.
Cette hantise opportuniste de l’extrême droite comporte un avantage inestimable : en nommant un ennemi commun et en le montrant continuellement du doigt, la gauche française se paie en effet le luxe de rassembler sous une même bannière à la fois ses composantes caviar et bobo ainsi que l’extrême gauche, cette extrême gauche dont la quasi disparition de l’intitulé dans le langage d’aujourd’hui voudrait nous faire croire qu’elle n’existe plus. Ainsi, grâce à ce subterfuge parfaitement démoniaque, à chaque élection qui se présente, la gauche bénéficie des voix de l’ensemble de son spectre politique, sans même avoir besoin de le demander, encore moins de s’en excuser auprès des belles âmes dépositaires du politiquement correct, ces belles âmes qu’elle a de toute façon majoritairement annexées grâce à cette double manipulation.
Une fois de plus, Hollande a raison de brandir ce hochet mitterrandien, car tel une puissante baguette magique :
-il permet de resserrer les rangs d’une gauche dépourvue de la moindre vision politique pour le pays ;
-il donne bonne conscience à la gauche caviar et bobo que le souci de la pauvreté et de la précarité semble avoir abandonné progressivement ;
-il permet de dévier l’attention du peuple sur l’échec économique de la gauche ;
-ultime raffinement, il ménage à l’ancien président la possibilité de revenir aux affaires !
La gauche française, une vacuité qui a changé de logo
Rien de tel pour relancer la cohérence d’un groupe que de lui rappeler son ennemi commun. Surtout lorsque ce groupe est en panne d’idée, s’avère incapable de proposer quoi que ce soit pour l’intérêt du pays, et ne peut finalement exister qu’en opposition à quelque chose d’autre. La nature a horreur du vide, quand bien même celui-ci ne s’appelle plus « Parti Socialiste » mais « République en marche ». Et pour donner l’illusion d’exister, le réflexe le plus fédérateur reste la désignation d’un adversaire extérieur.
En réalité, la situation de la gauche est passablement dépravée[6] car, que reste-t-il si on lui retire la stigmatisation de l’extrême droite ? Il ne lui reste plus que la haine de la réussite économique, le souci écologique et la défense des minorités politiquement correctes[7]. Vraiment pas de quoi redresser un pays comme la France au bord de l’implosion sociale !
La bonne conscience de gauche, un confort moral à peu de frais
Tout de même, quand on songe que le leitmotiv de la gauche française est depuis si longtemps la protection des faibles et des nécessiteux, on se doute qu’elle en a tiré un statut particulièrement avantageux, un statut derrière lequel il est facile de se badigeonner de beaux sentiments. Mais pourquoi donc cette gauche ontologiquement bien pensante ne séduit-elle plus ces pauvres et ces nécessiteux dont elle se gargarise sans cesse ? Les faits parlent d’eux-mêmes : en générant la pauvreté, en entretenant le déclin économique et social du pays, en protégeant les insiders au détriment des fragiles, la gauche a montré sa vraie nature.
Au moins, tout n’est perdu pour tout le monde : la moraline de cette gauche dont Alain Finkielkraut dit « qu’elle se prend pour la morale » conserve tout son pouvoir distributeur de certificat de moralité. Nombreux sont les citoyens qui, sans le savoir, s’abritent derrière lui, ce qui les tient soigneusement éloignés des vraies solutions, bien évidemment libérales et si décriées.
Détourner l’attention de ses échecs, une seconde nature à gauche
Par la force des choses, comme pour tout ce qui est d’essence idéologique, ainsi que l’a démontré Hannah Arendt[8], les faits sont rapidement délaissés et font place à une réalité reconstruite qui est censée tout expliquer. A gauche, le mépris des faits est un invariant qui fait que depuis Mitterrand, Chirac compris (derrière les étiquettes, ne considérons que les faits), la France s’obstine dans le traitement socialiste du chômage alors que la totalité des indicateurs démontre chaque année qui passe son inanité.
Par quel miracle un pays peut-il espérer enrayer sa désindustrialisation et son déclin économique, problème qui est du domaine de ce que l’on dénomme la crise de l’offre, avec des solutions destinées à traiter passagèrement les crises de la demande[9] ? C’est une énigme, une énigme typique d’un pays qui a la tête dans l’idéologie, loin des réalités économiques concrètes et démontrables.
Que Hollande classe le mouvement des gilets jaunes à l’extrême droite (Le parisien, 31/03/19) ne découle bien évidemment pas d’une analyse factuelle de la situation sociale du pays, mais d’un calcul politique visant à détourner l’attention vers d’autres mobiles qui pousseraient les manifestants à démontrer leur malaise dans la rue. Le mouvement actuel de protestation découle directement de l’appauvrissement du pays et de la précarité qui se répand dans des strates de plus en plus larges de la société française. Ce mouvement démontre une fois de plus l’inefficacité des politiques étatiques mises en place par la gauche depuis Mitterrand. Pour celle-ci, il est bien évidemment vital de dénigrer le mouvement et d’en nier les causes en faisant diversion sur l’extrême droite.
Se représenter après une débâcle, c’est possible en France
Après avoir menti sur les chiffres du chômage, après avoir donné des leçons de réforme économique à l’Europe tout en étant incapable de le faire chez nous, après avoir fait décrocher la France du reste de l’Europe pendant la période de reprise économique qui a suivi la fin de la crise du crédit, Hollande fait comme Bush junior en période électorale, lorsque son spin doctor avouait « ne viser que le Joe public américain ».
Hollande surfe sur l’apparence des choses et falsifie les faits car il sait pertinemment qu’une bonne partie des électeurs ne comprend pas les réalités économiques. Avec son hochet mitterrandien qu’il agite quand bon lui semble, il perpétue ainsi le mythe gauchiste et se réserve les meilleures chances de revenir au pouvoir.
Tel est le triste destin de notre pays, ce pays qui abhorre le seul courant qui pourrait enrayer son recul, le libéralisme, ce courant affublé de tous les maux au seul motif qu’il se trouve aux antipodes de l’idéologie socialiste dominante actuelle.
[1] -50% de parts de marché mondial en à peine plus de 20 ans ! Et des milliers de jobs qui n’existent plus !
[2] La France compte cinq millions de pauvres si l’on fixe le seuil de pauvreté à 50 % du niveau de vie médian et 8,8 millions si l’on utilise le seuil à 60 %, selon les données 2016 (dernière année disponible) de l’Insee (source Observatoire des inégalités)
[3] Seule la Grèce, l’Italie et l’Espagne font pire que nous en Europe
[4] Celui-là même qui lui a conseillé d’augmenter la pression fiscale en bas de cycle, juste après la crise bancaire, avec le résultat catastrophique que l’on sait : la France est le seul pays européen qui n’a pas bénéficié de la reprise qui a suivi cette crise !
[5] Le contexte est plus difficile pour tout le monde mais l’abus du keynésianisme, ce remède qui nous tue lentement, a débuté avec Mitterrand. Depuis, les solutions socialistes sont les seules qui sont utilisées, et font illusion en traitant la douleur du chômage et pas les causes
[6] Ce qui ne veut pas dire pour autant que la situation de la droite soit formidable
[7] Attention, toutes les minorités ne bénéficient pas de sa pitié bien sélective !
[8] « Le système totalitaire »
[9] Ce n’est pas le keynésianisme qui va faire revenir la France sur les marchés porteurs que sont l’électronique grand public, les machines outils, les voitures haut de gamme, etc…
2 avril 2019 5 h 15 min
[…] Sur le web […]